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Repères biographiques

21 juin 2021 Thomas More
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Homme du Moyen Âge et homme de la Renaissance, Thomas More a vécu ses 57 (ou 58) années au confluent de deux époques contrastées, ce qui ressort nettement de ses écrits, de ses idées, comme de sa vie.

Il est le second d’une famille de 5 enfants (3 sœurs et un frère) ; son père, John, marié quatre fois, avocat, termine sa carrière comme juge au Banc du Roi (la plus haute juridiction du royaume). Thomas s’initie au latin à St Anthony School, dès sa 7ème année ; vers 12 ans, il devient page chez le Cardinal Morton, archevêque de Canterbury, Chancelier du Royaume, riche personnalité dont il parlera plusieurs fois dans ses écrits.

Sa vive intelligence et sa mémoire, ainsi que ses dons d’acteur et son esprit de répartie impressionnent le Cardinal qui l’oriente, à partir de 14 ans, vers Canterbury College à Oxford, où il termine ses humanités.

Après deux années oxfordiennes, son père, craignant que le goût de son fils Thomas pour les « bonae litterae », les « belles lettres » ne l’écartent d’une carrière d’avocat, l’inscrit en droit britannique à Londres. C’est ainsi qu’en 1496, il devient « fellow » de Lincoln’s Inn, d’où il sortira avocat en 1501. En même temps que les études juridiques, Thomas trouve le temps de traduire en latin, avec son ami William Lilly, des épigrammes grecques.

Inscrit au barreau de Londres, More vit pendant 4 ans comme hôte de la Chartreuse de Londres, pour, ce que nous appellerions aujourd’hui, un temps de discernement, sans pour autant oublier des travaux humanistes. Nous connaissons plusieurs poèmes de jeunesse de cette époque. William Grocin, curé de St Lawrence, dans la Cité, lui confie un cycle de Conférences sur la Cité de Dieu de St Augustin, qui rencontre un grand succès. A 25 ans, le champ de ses centres d’intérêt s’élargit rapidement.

En 1499, il rencontre Erasme qui sera son ami le plus intime (Erasme lui dédie son célèbre Eloge de la Folie en 1509), jusqu’à la mort, et son premier biographe.

Il est attiré par le sacerdoce, mais à 27 ans, en 1504, -année où Luther entre au monastère-, Thomas préfère, comme l’écrit Erasme, « être un chaste époux qu’un prêtre impur » ; il se marie avec Joan Colt, qui lui donnera 3 filles et un fils.

En collaboration, « au coude à coude », avec Erasme, qui séjourne sous son toit en 1505-1506, il traduit en latin, les Dialogues de Lucien de Samosate, le satiriste, publiés à Paris en 1506. Autre traduction personnelle, en anglais, cette fois, d’une Vie et anthologie de Pic de la Mirandole, décédé en 1494 à 31 ans, dont l’érudition et la piété le marquent profondément.

Un premier voyage sur le continent, à 31 ans, le conduit aux Universités de Louvain et Paris, pour les comparer avec Oxford et Cambridge.

Après le décès de Joan en 1511, Thomas More épouse Alice Middleton, veuve avec une fille.

Devenu « Undersheriff » (Juge) de 1510 à 1518, à Londres, il continue à enseigner le droit.

Vers 1513, il compose un ouvrage, inachevé, Richard III, source majeure pour Shakespeare.

Lors de sa première mission d’ambassade en Flandres en 1515, Thomas More écrit le Livre II de l’Utopie, son ouvrage le plus célèbre et l’un des livres les plus imprimés, réimprimés et traduits dans le monde, qu’il achève à Londres, et qu’Erasme fait publier à Louvain en 1516.

More soutient à la même époque son ami Erasme, critique des dérives de l’Eglise, par sa Lettre à Van Dorp.

Il est encore « Undersheriff » lorsqu’il arrive à apaiser une grave émeute le 1er mai 1517. En 1518, il résigne cet emploi pour entrer au gouvernement que préside le Cardinal Wolsey.

C’est à la même époque qu’il se liera d’amitié avec Juan Luis Vives et Guillaume Budé. Avec Erasme, ces quatre érudits de quatre pays constituent les « mousquetaires » de l’humanisme européen.

De 1518 à 1533, la carrière de Thomas More s’avère de plus en plus brillante : il entre au Conseil Privé du roi Henry VIII, est nommé successivement Maître des requêtes, « Undertreasurer » (Ministre des Finances) du royaume, « Speaker » (Président) de la Chambre des communes, High-Steward des Universités de Cambridge et d’Oxford, Chancelier du Duché de Lancaster. En 1521, il est fait chevalier.

Ses missions diplomatiques lui permettent de rencontrer Budé au Camp du Drap d’Or en 1520, puis Erasme à Bruges en 1521. Il réussit deux missions délicates à Amiens, puis à Cambrai (Traité de la ‘Paix des Dames’) en 1529, année où, le 25 octobre, il est nommé Chancelier d’Angleterre.

Parcours d’autant plus impressionnant que, soit pour défendre son ami Erasme, soit pour répondre aux demandes des évêques anglais, en particulier Tunstal, évêque de Londres, mais aussi venant du roi, (ce dernier est alors déclaré par le Pape Léon X ‘Défenseur de la Foi’ pour son livre sur la « Défense des 7 sacrements »), il écrit pendant ces mêmes années plusieurs textes polémiques, apologétiques ou théologiques. Il prend la défense des idées humanistes et de l’Eglise catholique, face au protestantisme naissant, sans omettre une riche méditation, inachevée, sur la mort et le péché, Les Fins Dernières.

Pendant cette période intense de travail, Thomas a le souci constant de sauvegarder les relations personnelles avec ses amis et avec chacun des siens dans leur vie de chaque jour. S’il est retenu à la Cour ou par une mission diplomatique, il prend le temps d’écrire régulièrement à sa famille, s’intéressant aux moindres détails de l’éducation de ses enfants.

Au milieu de ces responsabilités et de ces lourdes charges, Thomas consacre du temps, et beaucoup de temps, à la prière personnelle, à la méditation des Ecritures, en particulier du récit de la Passion du Christ, à la lecture approfondie des Pères de l’Eglise, ainsi qu’à la prière familiale. Cette prière, comme sa fidélité à l’Eucharistie, lui permet de tenir fermement dans les épreuves qui approchent.

Le 16 mai 1532, écœuré par la capitulation de la hiérarchie devant la mainmise du roi sur l’Eglise, qui se fait reconnaître comme ‘Chef Suprême de l’Eglise d’Angleterre’, Thomas More demande à être déchargé de ses fonctions de Chancelier du Royaume. Le roi va l’accepter à regret, car sans doute espérait-il convaincre Thomas More de soutenir sa volonté d’épouser Anne Boleyn, après avoir fait annuler son mariage avec la reine Catherine par l’Eglise d’Angleterre dont il était devenu le chef.

1532-1534, deux années de vie privée où Thomas More écrit de nombreux ouvrages et, où, plutôt que de renier sa conscience, il se détache peu à peu de tous ses liens terrestres. S’abstenant de cautionner, malgré les pressions de toutes natures, les décisions royales acceptées par tous les grands du royaume, clercs comme laïcs, à l’exception de quelques chartreux et de l’évêque John Fisher, il en sait les conséquences. En refusant d’assister le 1er juin 1533 au couronnement d’Anne Boleyn, il signe son futur arrêt de mort. C’est alors que la primauté de la conscience chez St Thomas More s’affirme pleinement. 

Convoqué devant le Conseil du roi, il refuse de prêter serment d’allégeance au roi comme ‘Chef de l’Eglise d’Angleterre’. Emprisonné le 17 avril 1534, le même jour que son ami l’évêque John Fisher, pendant 14 mois à la Tour de Londres, Thomas More, malade, affaibli, rédige ses plus beaux écrits spirituels, Dialogue du Réconfort dans les Tribulations, Tristesse du Christ et ses lettres les plus émouvantes ; pendant cet emprisonnement, privé périodiquement de moyens d’écriture, il écrit avec un morceau de charbon de bois.

Son procès, ou plutôt son simulacre de procès, débute le 1er juillet 1535 -qui nous est connu par les minutes du procès et par la biographie écrite par son gendre Roper-, avec l’intervention d’un faux témoin, peut se comparer à celui de Jeanne d’Arc. L’un et l’autre font preuve, devant les juges, de leur foi profonde, avec des paroles inspirées par l’Esprit-Saint.

Condamné à mort, il est décapité le 6 juillet 1535, non sans avoir adressé à sa fille Margaret une dernière lettre de réconfort, d’espérance et d’attentions pour chacun des siens. Il prend la foule à témoin qu’il meurt dans, et pour la fidélité à l’Eglise Catholique, « bon serviteur du roi, et de Dieu premièrement ».

Béatifié par Léon XIII le 29 décembre 1886, jour de la fête de St Thomas Becket, il est canonisé par Pie XI en 1935. Proclamé Patron des Dirigeants et des Hommes de Gouvernement par Jean-Paul II en octobre 2000, Thomas More avait été choisi, en 1970, comme Parrain de la Promotion Thomas More de l’ENA (Ecole Nationale d’Administration)

Depuis 1962, une association, les Amici Thomae Mori, et une revue, Moreana, internationales, diffusent la pensée de Thomas More et des humanistes de la Renaissance dans près de 40 pays dans le monde.




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